(Voici le début du roman. Nous sommes chez les Martin. C'est
Sophie, une jeune fille de 13 ans, qui raconte.)
Ce
soir-là, maman et papa regardaient un film à la télévision avec les jumeaux. Moi,
je m'étais privée pour réviser au mieux mon contrôle de biologie, c'est ma matière
préférée et j'y mettais beaucoup du mien. Quant à Bébé Jules, il dormait tranquillement
dans son berceau après son biberon du soir. C'est pourquoi je n'ai rien de particulier
à en dire.
A
ce niveau de l'intrigue, j'ignore si je dois vous brosser un portrait physique
et moral de chacun des membres de la famille, la Chouque y comprise, qui est la
plus belle chatte du lotissement avec ses pattes rousses et ses yeux bleus, mais
si je commence à dénombrer et à décrire, je sens que je vais m'égarer. J'en viens
au fait sans plus attendre.
Tout à coup, nous avons entendu un bruit énorme, effrayant, apocalyptique !... Mon
coeur a bondi dans ma poitrine. J'ai entendu maman hurler dans le salon :
— C'est un tremblement de terre !
et
papa lui a répondu pour la rassurer :
—
Mais non, c'est le ballon d'eau chaude qui a explosé dans le garage.
Aussitôt
l'un des jumeaux, le plus jeune, s'est écrié :
— Hyper-giga !... On va passer à la télé avec les pompiers !
et
l'aîné a ajouté en écho :
—
La vie vaut vraiment la peine d'être vécue.
Sur
ce, pour ne pas être en reste, Bébé Jules a commencé à pousser sa chanson de bébé
de six mois qu'on réveille. Bonjour l'ambiance ! J'ai pressenti que mes révisions
de biologie allaient passer à la trappe. J'ai laissé tomber mon manuel. Je me
suis précipitée.
Peu
de temps après, le coeur battant, nous nous sommes tous retrouvés, sauf Bébé Jules
et la Chouque, devant la porte qui fait communiquer la cuisine et le garage...
Nous entendions, derrière, des bruits d'objets qui tombent et des sortes de barrissements.
Nous nous interrogions du regard avec une inquiétude que je ne saurais décrire.
Fallait-il alerter la police ? les pompiers ?... Papa a pris sa décision dans
l'urgence. Il a respiré profondément, il a ouvert la porte d'un geste énergique
et nous avons vu... la Chose !
Essayez
de vous représenter une créature molle et rosâtre, à l'apparence très proche de
celle d'une énorme pieuvre, une créature hérissée de tentacules qui fouettaient
l'air en sifflant, et animée de soubresauts comme si un démon logé à l'intérieur
cherchait à s'en extirper — essayez donc, mais vous n'aurez pas encore une
idée de la Chose parce qu'elle était pire que cela en vérité !...